« Quel film » ! « On s’est regardés en sortant de la salle, l’air grave et je me sentais assez mal ». C’est peu de le dire, mes collègues m’ont franchement donné envie d’aller voir Le Successeur, un film passé inaperçu à mes yeux lorsque la programmation du mois de mars m’est parvenue. L’histoire d’un grand couturier d’origine québécoise arrivé à l’apogée d’une carrière qu’il doit brièvement mettre en pause afin d’organiser les funérailles de son père, tout juste décédé dans son pays natal, et avec qui il n’avait plus contact depuis plusieurs années. Un pitch assez classique, qui ne vend pas du rêve - soyons honnêtes - et qui pourtant cache un très, très grand film. Cette fausse banalité pose les bases d’un récit qui prend une tournure totalement inattendue - aidé par un tournant qui divisera - et dont il est impossible d’en dévoiler les contours, au risque d’anéantir tout le plaisir (ou le malaise) que provoque ce film. Et d’ailleurs, les critiques ont déjà suffisamment tenté l’exercice pour que je m’y risque ici.

Moi aussi je suis sorti un peu sonné de cette expérience de cinéma. Et pour tout dire, c’était ma deuxième claque en l’espace de quelques jours puisque j’avais rattrapé Jusqu’à la garde entretemps. Force est de constater que Xavier Legrand a réalisé deux coups de maître, coup sur coup, dans des styles mélangeant différents genres de cinéma. Passant du thriller à l’horreur, le réalisateur français efface complètement les cases dans lesquelles on classe si facilement les films (ou la musique) pour livrer une expérience avant tout sensorielle. Difficile, dans Jusqu’à la garde, de ne pas ressentir l’angoisse que vit le personnage de Léa Drucker quand celui de Denis Ménochet, massif et intimidant, tente de forcer la porte de la pièce dans laquelle elle se cache avec son fils. Impossible, dans Le successeur, de ne pas ressentir le malaise que vit le personnage de Marc-André Grondin au funérarium, quand les révélations concernant un certain passé se brisent coups après coups sur son visage.

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Marc-André Grondin, touchant et inquiétant

Si le premier film de Xavier Legrand - par ailleurs suite de son premier court métrage (décidément !) Avant que de tout perdre - a eu le plébiscite du public et critique lors de sa sortie en 2017, avant de rafler toute une série de récompenses et trophées (César du meilleur film, du meilleur scénario original, Lion d’argent de la meilleure mise en scène à la Mostra…), le début de carrière de Le successeur est plus compliqué. Un succès mesuré en salle et des critiques positives certes, mais aussi plus prudentes entachent quelque peu le début de carrière de cette deuxième œuvre. Est-ce qu'on en attendait-on trop de Xavier Legrand après son premier coup de maître ? Est-ce que ce fameux tournant, évoqué plus haut, est assimilé à un passage en force, grossier, de son scénario pour faire avancer le récit ? Peu importe ces considérations, Le successeur est assurément un film à ne pas manquer, et qui risque d’encore faire parler de lui à la prochaine saison des trophées du cinéma.


Sébastien

Responsable de la communication

Films

  • Le successeur

    Ellias Barnès vient d'être nommé directeur artistique d'une célèbre maison de couture à Paris. Les attentes sont si grandes qu'elles lui causent des maux de cœur. Lorsque son père meurt et que les funérailles doivent être organisées à…

    Genre
    Drame
    Durée
    1H52
    Le successeur
  • Jusqu'à la garde

    Le couple Besson divorce. Pour protéger son fils d’un père qu’elle accuse de violences, Miriam en demande la garde exclusive. La juge en charge du dossier accorde une garde partagée au père qu’elle considère bafoué. Pris en otage…

    Genre
    Drame
    Durée
    1H33
    Jusqua la garde